La Peste - Albert Camus
- Naturellement, vous savez ce que c'est, Rieux?
- J'attends le résultat des analyses.
- Moi, je le sais. Et je n'ai pas besoin d'analyses. J'ai fait une partie de ma carrière en Chine, et j'ai vu quelques cas à Paris, il y a une vingtaine d'années. Seulement, on n'a pas osé leur donner un nom, sur le moment... Et puis, comme disait un confrère: “C'est impossible, tout le monde sait qu'elle a disparu de l'Occident.” Oui, tout le monde le savait, sauf les morts. Allons, Rieux, vous savez aussi bien que moi ce que c'est...
- Oui, Castel, dit-il, c'est à peine croyable. Mais ils semble bien que ce soit la peste.
La Peste, un roman d'Albert Camus qui a connu immédiatement un grand succès après sa publication. Ainsi, le livre est souvent traité en classe de Terminale / Première.
Voici une analyse complète du roman qui vous guidera et qui vous sera certainement d'une grande aide. Vous trouvez ci-dessous (Table des matières) non seulement un cours structuré (avec analyse) de La Peste, mais aussi de nombreuses questions de développement (ayant déjà été sujets d'examen).
En bas de chaque page vous trouvez des liens supplémentaires qui font référence au sujet traité.
Questions et commentaires sont les bienvenus... ;)
Si vous êtes en Terminale / Première, je vous souhaite une bonne réussite et j'espère que les notes vous aideront pour l'examen!
Table des matières
Chronique et chroniqueur - l'illusion du réel
Dès les premières lignes, Camus indique que le lecteur s'apprête à lire une chronique, c'est-à-dire un récit d'événements qui suit l'ordre du temps. Et en effet, La Peste applique la logique de la chronique. Ainsi, il n'y a pas d'anticipations, pas de titres, mais des dates précises et des points de repères temporels. De même, le narrateur qui se présente comme un témoin privilégié par les circonstances, souligne l'existence de témoignages et de documents sur lesquels il s'appuie parce qu'il entend faire oeuvre d'historien (p.ex. les carnets de Tarrou). Il s'agit en l'occurrence de son témoignage, de celui des autres et de textes qu'il a trouvés. Ainsi le narrateur nous fait croire qu'il évoque des événements réels, mais dès les premières pages, Camus insiste sur l'illusion romanesque. La Peste n'est pas une chronique, mais un roman qui prend les apparences d'une chronique pour mieux assurer l'illusion du réel. Le narrateur, qui veut rester anonyme, exprime bien son jugement dès les premières pages. Ainsi, il critique notamment l'appât du gain de ses concitoyens, il fait entendre que lui, il est bien plus attiré par les joies simples que ses concitoyens et il rit des soi-disant vices des Oranais.
Albert Camus insère son roman dans le réel comme le montre la description qu'il fait d'Oran. Il veut que son récit, qui est un récit symbolique, construise des symboles sur le concret.
Notions de la philosophie d'Albert Camus
Afin de bien comprendre les idées mises en scène dans La Peste, il faut expliquer certaines notions de la philosophie d'Albert Camus. Notons que Camus ne cessait de répéter qu'il n'était pas philosophe et qu'il vise uniquement à décrire la sensibilité absurde.
L'absurde
La philosophie de Camus est une philosophie de l'absurde qu'il défint dans Le Mythe de Sisyphe. Et l'absurde naît pour lui du rapport de l'homme et du monde, des exigences raisonnables de l'homme et de l'irrationalité du monde. Les jours se suivent et se ressemblent et l'homme passe ses journées à répéter toujours les mêmes gestes. Cependant, un jour, il se pose la question du pourquoi, et alors il ressent une grande lassitude qui s'accompagne d'un écoeurement.
Le temps est notre pire ennemi, car il conduit à l'anéantissement de tous nos efforts. Enfin, c'est la mort qui révèle définitivement l'absurdité de la vie.
L'homme absurde
Contrairement aux autres philosophes, Camus ne sort pas du constat de l'absurde en cherchant refuge chez Dieu ou quelque autre transcendance. Camus récuse les attitudes d'évasion que sont le suicide d'une part parce qu'il supprime la conscience et les doctrines situant hors de ce monde les raisons et les espérances qui donneraient un sens à la vie.
La révolte
Selon Camus, la seule solution logique à ce drame est d'accepter de vivre avec cet affrontement sans espoir entre l'esprit et le monde. Ainsi, une des seules positions philosophiques cohérentes est la révolte: cette révolte n'est que l'assurance d'un destin écrasant moins la résignation qui devrait l'accompagner. Camus estime que «c'est cette révolte qui confère à la vie son prix et sa grandeur».
La liberté
Jusqu'à la rencontre de l'absurde, l'homme avait l'illusion d'être libre. Cependant, il était esclave de l'habitude ou des préjugés qui ne donnaient à sa vie qu'un semblant de but et de valeur. La découverte de l'absurde lui permet de tout voir d'un regard neuf: il est profondément libre à partir du moment où il reconnaît lucidement sa condition sans espoir et sans lendemain.
La passion
Dans cet univers absurde où il habite, l'homme doit multiplier avec passion les expériences lucides. «L'homme est sa propre fin et il est sa seule fin», mais parmi ses actes il en est qui servent ou desservent l'humanité, et c'est dans le sens de cet humanisme que va évoluer la pensée de Camus.