Montrez que la peste présente un visage contradictoire : elle détruit et elle instruit, elle sépare et elle relie
Dans un premier temps, la peste est considérée comme étant une « créature » qui détruit et sépare. Ceci peut par exemple être illustré par l'isolement de la ville d'Oran. Les Oranais sont « condamnés pour un crime inconnu à un emprisonnement inimaginable ». Le fléau détruit donc la liberté des habitants, qui eux, deviennent prisonniers de leur propre ville, à l'exception de Rambert. Il y a interdiction de sortir de la ville, l'état de peste devient un état de siège et les autorités d'Oran ont même instauré un couvre-feu. Ainsi, la seule possibilité de revoir ceux qui se trouvent à l'extérieur de la ville, c'est-à-dire ceux qui sont partis avant la peste, est de les faire revenir, ce qui signifie cependant qu'on les expose à un danger.
Cependant, la peste détruit non seulement la liberté des Oranais, mais elle détruit même, si on entend « détruire » dans le sens d' « éliminer », toute une population. Au début, il n'y a que la mort du concierge, mais peu après l'invasion des rats, le nombre de morts monte de plus en plus rapides, si bien qu'il n'y a même des camps d'isolement qui sont mis en place et que tout finit par des problèmes d'enterrements.
Ainsi, nous pouvons faire un lien avec la séparation. Comme nous l'avons vu plus haut, les Oranais sont prisonniers et ainsi aussi séparés de ceux qui sont partis avant que la peste ait frappé la ville. Rambert, Grand et Rieux sont séparés de leurs compagnes et éprouvent une certaine souffrance, surtout en ce qui concerne Rambert que est doublement séparé (compagne et pays). On le remarque par exemple au fait que Rieux s'investit davantage dans son métier pour oublier ses sentiments et Rambert, lui, fait tout pour s'enfuir. Les Oranais ne sont pas seulement séparés du reste du monde, mais aussi à l'intérieur même de la ville. La famille Othon est un bon exemple pour expliquer cette idée. Le fils Philippe, qui est atteint du fléau, est emmené à l'hôpital, alors que le juge Othon est amené au camp d'isolement dans le stade et que la mère et la soeur sont logées dans un autre camp pour éviter que toute la famille soit infectée. Il nous reste la séparation définitive, à savoir la mort qui est une séparation irréversible. Ainsi, les Oranais sont les uns après les autres confrontés à leur solitude.
Après avoir analysé dans quel sens la peste détruit et sépare, nous nous intéressons dans la suite à son visage positif, pour montrer dans quelle mesure la peste instruit et relie.
Tout d'abord, le fléau a les moyens de rapprocher les habitants de la ville. Avant que le féau frappe Oran, les Oranais ne s'intéressent qu'à leurs affaires, ils sont occupés à gagner de l'argent et à dissiper leur temps libre en futilités. Au moment de l'état de siège cependant, la peste amène les Oranais vers la solidarité. Même Rambert, dont tous les efforts ont consisté à trouver des moyens de s'enfuir, manifeste sa solidarité. Les Oranais cherchent ensemble une solution pour lutter contre le fléau, même les athées et les croyants commencent à travailler ensemble pour la même cause.
Ensuite, on a un certain engagement qui se crée. Au début, avec le premier rat mort, les Oranais continuent la poursuite de leur vie monotone et ignorent complètement les quelques rats morts qu'on commence de trouver dans la ville. Ce n'est qu'à partir de l'invasion des rats qu'il y a présence d'une inquiétude qui est, lors de la déclaration de l'état de peste, transformée en un engagement partagé par la plupart. Tarrou crée les formations sanitaires volontaires, Rieux continue son travail de médecin, Grand apporte son soutien par de petits efforts quotidiens en évaluant les statistiques et même Rambert finit par faire un bon travail d'assistance. Rieux et les autres finissent même par faire douter le père Paneloux qui, dans un premier temps, est certain qu'il s'agit d'une condamnation divine. Il finit ainsi par lutter avec les autres pour combattre le fléau qui, depuis des mois, fait ses ravages à Oran.
Finalement, la peste instruit les Oranais aussi sur la vie. Elle illustre de façon très claire que la mort nous attend tous à la fin de notre chemin. Pour cela, il faut apprécier les petites choses qu'on a dans notre vie avant qu'il ne soit trop tard. Quelques Oranais vivent dans les regrets de ne pas avoir aimé assez, comme par exemple Rieux, ou d'avoir ignoré la présence de la famille quand elle était à leurs côtés parce que les habitants étaient occupé à faire des affaires.
En guise de conclusion, on peut dire que Camus réussit à présenter au lecteur la peste qui présente un visage contradictoire. L'épidémie est en général quelque chose de très négatif, une créature qui amène le Mal à l'Homme, cependant à bien considérer les choses, la peste peut nous aider à trouver les valeurs de la solidarité, de l'amitié et de la fraternité. Elle a la capacité d'ouvrir les yeux aux gens qui eux, n'étaient pas conscients de toutes ces choses avant.
(cf. voir Oran et les Oranais)