Un récit allégorique

L'allégorie est une figure d'expression qui offre un double sens (littéral et symbolique) en représentant une idée par une image plus sensible et plus frappante.
Ainsi, la peste est une allégorie en ce qu'elle représente toutes les formes du mal qui peuvent nuire à l'homme. La peste, ce « bacille [qui] ne meurt ni ne disparaît jamais », symbolise donc toutes les maux qui affligent la condition humaine. (p.310)
Comme le lexique de la guerre est souvent utilisé, cette chronqiue d'une épidémie de peste peut évoquer une chronqiue de guerre. L'allusion à la période de la Seconde Guerre mondiale et à l'Occupation allemande transparaît en effet dans le texte à travers l'atmosphère de la libération de la ville. Oran délivrée de la peste rappelle Paris délivrée de la guerre du 19 au 25 août 1944 après quatre années d'Occupation.
Mais la signification du récit dépasse encore cette lecture et tend à renvoyer le lecteur à toute guerre, à tout fléau menaçant l'humanité.

La ville joyeuse que Rieux observe depuis la terrasse du vieil asthmatique symbolise l'humanité entière qui fête sa délivrance de la peste et la fin de son isolement. La ville représente certes la population oranaise, une communauté d'hommes soudée par l'épreuve et enfin par la joie, mais aussi toute ville moderne et les Oranais toute communauté humaine. Telle est la signification de la réflexion du vieil Espagnol que Rieux se remémoire: « Le vieux avait raison, les hommes étaient toujours les mêmes. » (p.309) La chronique et la réflexion de Rieux à la fin ont donc une portée plus générale: l'Oranais incarnce tout homme dans sa banale quotidienneté et son humaine condition.

Le dernier passage de La Peste renvoie à l'épigraphe qui incite le lecteur à comprendre le roman comme un récit symbolique: la peste renvoie à l'enfermement de l'homme dans sa condition humaine. En effet, tous les hommes abritent en eux le virus de la peste, symbole de cette maladie morale qui peut s'appeler égoïsme ou indifférence. Voilà pourquoi il faut rester vigilant.
Rieux est parfaitement lucide: il sait que « cette chronique ne pouvait pas être celle de la victoire définitive. Elle ne pouvait être que le témoignage de ce qu'il avait fallu accomplir et que, sans doute, devraient accomplir encore, contre la terreur et son arme inlassable, malgré leurs déchirements personnels, tous les hommes qui, ne pouvant être des saints et refusant d'admettre des fléaux, s'efforcent cependant d'être des médecins. » (p.310) Rieux écrit pour témoigner, c'est-à-dire pour rappeler les souffrances passées d'hommes, pour lutter contre l'oubli et pour conserver la mémoire de ces victimes de peste.

Les victoires ne seront donc jamais que provisoires, voilà ce dont Rieux est conscient: « Ecoutant [...] les cris d'allégresse qui montaient de la ville, Rieux se souvenait que cette allégresse était toujours menacée. Car il s'avait [...] que le bacille de la peste ne meurt ni ne disparaît jamais. » (p.310)
«Rieux décide alors de rédiger le récit qui s'achève ici, pour ne pas être de ceux qui se taisent, pour témoigner en faveur de ces pestiférés, pour laisser au moins un souvenir de l'injustice et de la violence qui leur avaient été faites, et pour dire ce qu'on apprend au milieu des fléaux, qu'il y a dans les hommes plus de choses à admirer que de choses à mépriser. » (pp.309-310) En optant pour la technique narrative de la chronique, Rieux opte pour un témoignage objectif: il témoigne de la misère, mais aussi de la joie des hommes sans les juger. La chronique permet ainsi au narrateur d'exprimer non pas son point de vue singulier sur l'épidémie, mais la douleur des hommes.
Une autre raison d'être du témoigange de Rieux est le rappel d'une foi en l'homme. Le mot de la fin vient en effet souligner que La Peste ne constitue pas une peinture désespérée de la condition humaine. Les hommes sont capables du pire et du meilleur. Ils se doivent d'être responsables, car la seule dignité de l'homme est en effet sa lutte quotidienne contre l'absurdité des fléaux, sa révolte continue contre l'absurdité de la condition humaine.

(cf. voir Albert Camus choisit un contexte d'épidémie pour exposer une réflexion sur la condition humaine. Expliquez.)

(cf. voir « Le docteur Rieux décida donc de rédiger le récit qui s'achève ici (...) pour simplement dire ce qu'on apprend au milieu des fléaux, qu'il y a dans les hommes plus de choses à admirer que de choses à mépriser. »
Illustrez ces propos en vous référant aux personnages de Rambert et de Grand. Vu l'actualité mondiale, pensez-vous que cette réflexion sur l'être humain soit valable?
)

(cf. voir La Peste ne constitue pas une peinture désespérée de la condition humaine. Discutez cette affirmation en basant votre réflexion sur des arguments pertinents et sur des exemples précis empruntés au roman d'Albert Camus.)


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