Le pouvoir / le despotisme dans Zadig

  • L'approbation est une critique de la censure à laquelle il faut se plier: soumission au pouvoir de l'Eglise et au pouvoir royal
  • Entrée en scène du roi Moabdar (Chapitre 3): roi juste et raisonnable qui ordonne qu'on rende à Zadig l'argent de l'amende, mais ce roi est un être bien trop versatile pour qu'il soit un exemple
  • Arbitraire du pouvoir despotique (Chapitre 5):
    • Le roi disgracie par caprice un ministre qui était pourtant son favori
    • Les courtisants flattent le roi quelles que soient ses décisions. Seul Zadig ose dire du bien du ministre digracié ce qui montre qu'il est courageux
  • Moabdar est jaloux, ce qui fait de lui un roi injuste, méfiant, cruel et contrôlé par la colère (Chapitre 8)
  • Roi manipulé par son entourage et les cabales / intrigues des courtisans: il ne sait plus démêler le vrai du faux
  • Mise en scène du pouvoir arbitraire et de la folie du roi (Chapitre 16): quand Moabdar épouse Missouf, la capricieuse, Babylone tombe dans l'anarchie totale. La révolte et la guerre éclatent, le roi devient fou et meurt

Par opposition:

  • Zadig, le bon ministre (Chapitre 6)
  • Le choix du nouveau roi (Chapitre 17): le plus vaillant et le plus sage. Le résultat au tournoi et l'épreuve des énigmes sont considérés, et non pas la naissance et la classe sociale. On évite ainsi les intrigues des courtisans, on garde la reine pour éviter son interventions subjective et l'armure est le garant de l'anonymat (neutralité)
  • Le règne de Zadig (Chapitre 19):
    • Paix, gloire, abondance
    • Justice, amour, vénération de la Providence
    • Système politique idéal:
      • Roi philosophe qui soutient le progrès et qui garantit le bonheur de tous
      • Roi entouré de conseillers qui sont ses amis (Cador) et d'hommes courageux et qui savent combattre (Arbogad)
      • Le commerce est favorisé: prospérité (Sétoc et Almona)
      • Les dévoués sont récompensés (nain)
      • La justice est rétablie (le pêcheur, Orcan)
      • L'Être suprême est adoré
  • Le roi aussi est heureux: pour accéder au bonheur, il faut d'abord accéder à la sagesse. Il y a donc une fin optimiste: le bonheur individuel et le bonheur social sont conciliables!

L'aventure politique de Zadig entre destin et arbitraire royal

Les chapitres V à VIII brossent la carrière d'une ascension politique du personnage de Zadig, puis de sa disgrâce. Non content de proposer ainsi une réflexion sur la fortune et ses revers, Voltaire dispose au cœur de sa fable une satire du pouvoir injuste et arbitraire, proposant en creux la figure de bon monarque, ce fameux monarque éclairé auquel les Lumières aspirèrent. Finalement, ce n'est même pas seulement la fortune qu'il conviendrait d'accuser des malheurs de Zadig, mais aussi les passions capricieuses d'un monarque jaloux, abusant de sa toute-puissance. Le bon roi serait celui qui, avant de commander aux autres, se commande à lui-même. Ainsi le conte de Voltaire propose-t-il une satire du pouvoir absolu de droit divin qui peut d'un revers de main décider de vie ou de mort sur tel ministre ou individu, fût-il de ses favoris.

Royauté et philosophie

Dans une monarchie de droit divin, il n'est ni progrès ni effort civilisateur sans tempérance de ce pouvoir. Si le roi décide seul pour tout le royaume, il faut qu'il soit éclairé, juste, et non tyrannique. La pensée politique des Lumières analyse donc le système monarchique pour en instituer ou en imposer les limites. Les deux œuvres capitales conduisent tout le siècle à élaborer l'idée d'une monarchie éclairée, Les Mémoires du duc de Saint-Simon et De l'esprit des lois de Montesquieu (1748), élaborent en effet une théorie politique ajustant monarchie et droit naturel, pouvoir d'un seul et contrôle de ce pouvoir. C'est que, dès la fin du XVIIe siècle, le pouvoir louis-quatorzien provoqua une réaction critique, celle de Fénelon (Les Tables de Chaulnes, 1711), par exemple, proposant un contrôle du pouvoir absolu par des Conseils où la grande aristocratie pût exercer son influence, que Louis XIV amputa. Zadig suggère les moyens de tempérer le pouvoir autocrate, par l'intervention d'un ministre juste ou d'un philosophe éclairé.
Le conte illustre les méfaits du despotisme, qui justifie les prérogatives du dogme ecclésisatique sur la censure des mœurs. Il n'est dès lors guère étonnant qu'intervienne la figure mythique du roi Salomon, mais surtout que la fin du conte de Voltaire rend possible l'espoir d'un règne juste. Nul doute qu'un Rousseau n'en eût pas dit autant. Mais le choix du conte aussi bien que l'esprit de Voltaire commandent cette fin heureuse et optimiste. Après tout, il ne s'agit d'un conte, Voltaire le sait, Voltaire s'en amuse, Voltaire nous le dit.


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